"Si je recommencerais ma vie, je tâcherais de faire mes rêves encore plus grand"
George Bernanos
Je n'ai aucune nostalgie du passé, la belle époque n'en avait que le nom, elle était plus laborieuse qu'aguichante, elle sentait le charbon, le crottin de cheval, elle suait la misère, elle n'enfilait ses habits du dimanche que pour quelques noces barbares.
http://www.youtube.com/watch?v=67A6yTgzt5I
Vous ne savez ce que c'était ce temps-là, quand à la bricole il fallait sur des kilomètres se coltiner la péniche, quand les pieds saignaient dans les sabots, quand sur les mains éclataient les engelures, quand en été la sueur tel un mauvais vin vous piquait les yeux, nous étions alors des chevaux de labour, des hommes de trait.
Sur les photos nous avions le sourire aux lèvres, mais combien d'entre nous n'ont eu la baraka sur le chemin des Dames, dans les plaines de la Champagne, sur les collines de l'Argonne ? fauchés les pantalons rouges de la classe 14 et les bleuets de 17, fanés comme des coquelicots, engloutis les hommes du génie, les pontonniers et coulées nos Flamandes...
Vous passez maintenant fière comme Artaban au macaron de vos automoteurs devant mes fenêtres, je vous envies un peu mais pas de trop, je ne siffle plus l'air de la Madelon depuis longtemps, je n'ai pas de regret le passé est le passé, et puis de toutes manières vous m'avez oublié, je vous laisse les miettes de ce qui fut un métier de forçat, mais nous avions la fierté d'être comme vous des artisans mariniers.
demain je mettrais mon sarrau, mes sabots et sur les chemins de halage de Cambrai à St Quentin je vous emmènes à mon bord pour mon dernier voyage....
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